Évolution de l’article 671 du Code civil relatif aux arbres, arbrisseaux et arbustes près de la limite de la propriété

L’attention de la ministre de la Justice a été attirée sur l’adaptation éventuelle de l’article 671 du Code civil résultant d’une loi du 20 août 1881 non modifiée depuis qui dispose qu’« il n’est permis d’avoir des arbres, arbrisseaux et arbustes près de la limite de la propriété voisine qu’à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants ou par des usages constants et reconnus, et à défaut de règlements et usages, qu’à la distance de deux mètres de la ligne séparatrice des deux héritages pour les plantations dont la hauteur dépasse deux mètres, et à la distance d’un demi-mètre pour les autres plantations ».

Cet article pourrait ainsi être enrichi avec les ajouts suivants :

  • les arbres implantés à la distance de deux mètres de la limite de séparation ne doivent pas dépasser 10 mètres et pour toute hauteur supérieure jusqu’à 30 mètres, la distance à respecter avec la limite de séparation doit être la même que la hauteur, nonobstant les dispositions susrelatées pour les distances légales ;
  • toute implantation d’arbres de haut-jet ou de haute-tige tel que défini par le Code rural est interdite à moins de 30 mètres d’une maison d’habitation ou de tout autre bâtiment professionnel ou agricole sans considération de la limite entre propriétés.

La ministre répond qu’il est de principe, consacré et protégé par l’article 544 du Code civil, que la propriété emporte le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue.

Les exceptions légales et réglementaires à ces dispositions ont vocation à régir les cas d’exercice du droit de propriété les plus attentatoires aux droits d’autrui, telle l’implantation d’arbres à moins de deux mètres d’un fonds voisin, régie par l’article 671 du Code civil.

Au-delà de ces cas particuliers, le caractère absolu de la propriété reprend son plein effet et la loi ne peut que renvoyer au juge le soin d’apprécier l’existence d’un abus de droit ou d’un trouble anormal de voisinage.

La modification législative proposée dans le cadre de la présente question écrite a pour objet de régir la hauteur des arbres situés sur la limite du périmètre légal défini par l’article 671 du Code civil, et hors de ce périmètre.

Or cette mesure ne permettrait pas d’éviter la naissance d’un contentieux entre voisins car la demande d’abattage devra toujours, dans ces situations conflictuelles, être formulée en justice. La mesure n’apparaît pas plus opportune sur le plan des principes. L’extension de l’abattage de droit, même lorsque l’arbre en cause ne génère aucune nuisance, pourrait être analysée comme une atteinte disproportionnée au droit du propriétaire de jouir librement de son fonds.

Il est également notable que la préservation du patrimoine arboré, particulièrement en milieu urbain, fait l’objet d’une grande attention et que l’abattage pourrait s’avérer prohibé au niveau local, en application :

  • des usages locaux ;
  • des plans locaux d’urbanisme, qui sont des règlements au sens de l’article 671 du Code civil. Ils peuvent interdire l’abattage ou le soumettre à autorisation d’urbanisme, appliquer aux plantations existantes le régime des espaces boisés classés quand bien même elles s’avéreraient attenantes à des habitations, et impliquer une obligation de replanter (C. urb., art. L. 113-1, C. urb., art. L. 151-19, C. urb., art. L. 151-23, C. urb., art. R. 113-2) ;
  • des différents régimes de protection des espaces naturels sensibles (L. n° 86-2, 3 janv. 1986 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, obligations liées aux zones de protection du patrimoine architectural urbain et paysager, directives de protection et de mise en valeur des paysages, etc.).

Les dispositions de l’article 671 du Code civil ont, en effet, un caractère subsidiaire et il ne paraît pas souhaitable de remettre en cause ce régime équilibré et protecteur.

 

Rép. min. n° 16691 : JOAN, 9 juill. 2019, p. 6458, Batut X.

 

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