Après quinze ans de vie commune, le mariage de M. Y. et de Mme X. est célébré le 7 septembre 1996, deux semaines avant le décès du mari. Le service des pensions refuse à Mme X. le bénéfice d'une pension de réversion, faisant valoir que la durée du mariage des époux, postérieure à la cessation d'activité, a été inférieure à quatre années et qu'aucun enfant n'est issu du mariage. La cour administrative d’appel de Paris lui ayant confirmé le refus de lui attribuer une pension de réversion, du chef de son défunt époux, Mme X. saisit le Conseil d’Etat, arguant que les dispositions du Code des pensions civiles et militaires de retraite refusant de prendre en compte le concubinage pour l’attribution d’une pension de réversion constituent une discrimination prohibée par la Convention européenne des droits de l’homme.
Dans son arrêt du 6 décembre 2006, la Haute juridiction en décide autrement. En premier lieu, elle considère qu’en vertu des dispositions du Code civil, les conjoints sont assujettis à une solidarité financière et à un ensemble d'obligations légales, telles que la contribution aux charges de la vie commune, qui ne pèsent pas sur les personnes vivant en concubinage ; que cette différence de situation justifie, au regard de l'objet de la loi, la différence de traitement qu'elle institue entre les couples vivant en concubinage et ceux unis par les liens du mariage pour l'attribution du droit à une pension de réversion ; que dès lors, Mme X. n'est pas fondée à soutenir que la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit en jugeant qu'un tel critère, relatif à l'état matrimonial des personnes, ne pouvait être regardé comme constituant une discrimination prohibée par les stipulations de l'article 14 de cette convention et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention.
En second lieu, le Conseil d’Etat estime que si le législateur a subordonné le droit à pension de réversion, en l'absence d'enfants, à une condition de durée de mariage de quatre années, une telle condition, destinée à faire dépendre la dette de l'Etat de la stabilité du mariage en limitant les risques de fraude, est fondée sur un critère objectif et rationnel en rapport avec les buts de la loi et ne méconnaît pas les stipulations précitées.