L'attention du ministre de la Justice a été attirée sur la question de la responsabilité des membres du conseil syndical dans une copropriété.
Le ministre indique qu’en vertu des dispositions de l'article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, il incombe au conseil syndical d'assister le syndic de la copropriété et d'en contrôler la gestion. Outre ces obligations d'assistance et de contrôle, il donne son avis sur toutes questions qui concernent le syndicat, pour lesquelles il est consulté ou dont il se saisit lui-même. Conformément aux dispositions de l'article 27 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, ces fonctions de donnent pas lieu à rémunération.
Le conseil syndical est dépourvu de personnalité morale de sorte que le mandat de conseiller syndical est exercé par chacun des membres du conseil à titre individuel.
Le mandat du conseiller syndical le lie au syndicat des copropriétaires. Il en résulte qu'un copropriétaire n'est pas fondé à engager la responsabilité contractuelle d'un des membres du conseil sur le fondement de l'article 1992 du Code civil. En revanche, tout tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel qui lui est préjudiciable (Ass. Plén. 6 oct. 2006, n° 05-13255 ; s'agissant de l'action d'un copropriétaire tiers à un contrat de syndic : Cass. 3e civ. 22 mars 2018, n° 17-11449). Le caractère gratuit d'un mandat a toutefois une incidence sur les conditions d'appréciation de la faute du mandataire. Le second alinéa de l'article 1992 du Code civil limite l'engagement de sa responsabilité aux seuls manquements contractuels qui revêtent une certaine gravité.
À l'aune de ces dispositions, la jurisprudence cantonne fortement les possibilités d'engagement de la responsabilité des mandataires bénévoles tels que les conseillers syndicaux. Dans un arrêt du 29 novembre 2018, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a ainsi jugé que l'engagement de la responsabilité contractuelle du conseiller syndical par un copropriétaire tiers au mandat s'exerce dans les limites prévues par le second alinéa de l'article 1992 précité et requiert donc l'existence d'une faute suffisamment grave qui, au cas d'espèce, n'était pas constituée par une négligence dans la surveillance des comptes du syndic en l'absence de collusion frauduleuse entre le conseiller syndical et le syndic (Cass. 3e civ., 29 nov. 2018, n° 17-27766). Cette limitation de responsabilité est appliquée dans une hypothèse où le manquement invoqué du conseiller syndical porte sur sa mission première et centrale d'assistance et de contrôle du syndic. Elle parait transposable, sous réserve de l'appréciation souveraine des juges du fond, au cas d'un manquement à sa mission de conseil de l'assemblée générale. Si la Cour de cassation n'a pas été amenée à se prononcer sur l'engagement de la responsabilité du conseiller syndical par un tiers au mandat, pour manquement à sa mission de conseil, elle a toutefois précisé que des choix peu judicieux du mandataire ne constituent pas un manquement à son obligation de conseil pour d'autres types de mandats à titre gratuit (Cass. 1re civ., 14 juin 2000, n° 98-17752).
Des juges du fond saisis de litiges opposants un copropriétaire à un membre du conseil syndical ont pu quant à eux indiquer qu'il appartient au copropriétaire demandeur de démontrer que la décision prise après avis du conseil syndical s'est avérée inutile ou injustifiée, que les informations délivrées par les conseillers syndicaux à l'assemblée étaient sciemment erronées dans le but de le dénigrer ou lui nuire, et que ces conseillers syndicaux ne sauraient en toute hypothèse être tenus responsables des conséquences des décisions souveraines de l'assemblée (CA Paris, 21 juin 2017, n° 15/09932). Dans une affaire similaire, où une copropriétaire invoquait un abus d'autorité de l'ensemble du conseil syndical par le dépôt de notes indiquant le sens du vote des membres du conseil dans les boîtes aux lettres de la copropriété avant l'assemblée, la Cour d'appel de Paris a de nouveau rappelé que les copropriétaires réunis en assemblée générale sont libres de voter comme ils l'entendent, qu'il appartient au conseil syndical de donner son avis à l'assemblée générale en vertu de l'article 21 de la loi du 10 juillet 1965 et que le fait d'avoir remis à chacun un avis sur les différents projets de résolution n'était pas fautif (CA Paris, 20 sept. 2017, n° 15/10113). Cette jurisprudence est conforme à celle appliquée en droit commun du mandat, selon laquelle il appartient au demandeur tiers au mandat à titre gratuit de démontrer non seulement l'existence d'un manquement contractuel suffisamment grave, allant au-delà de la seule mauvaise exécution de son mandat, mais également que les actes imputés à faute ont été commis de mauvaise foi par le défendeur (Cass. 1re civ., 26 janv. 2012, n° 10-11528).
Rép. min. n° 15448 : JO Sénat, 27 août 2020, p. 3806, Détraigne Y.