Nicole Notat et Jean-Dominique Senard ont remis, le 9 mars 2018, aux ministres de la Transition écologique et solidaire, de la Justice, de l’Économie et des Finances et du Travail leur rapport intitulé « L’entreprise, objet d’intérêt collectif ». Chargés d’une mission sur l’entreprise et l’intérêt général par une lettre de mission du 11 janvier 2018, ils ont procédé à de nombreuses auditions de chefs d’entreprises, organisations représentatives, chercheurs et praticiens du droit, investisseurs, ONG, administrations, élus, etc.
Cinq recommandations d'ordre législatif ont tout d’abord été formulées :
il est proposé d’ajouter un second alinéa à l’article 1833 du Code civil précisant que « La société doit être gérée dans son intérêt propre, en considérant les enjeux sociaux et environnementaux de son activité » ;
il est recommandé de confier aux conseils d’administration et de surveillance la formulation d’une raison d’être visant à guider la stratégie de l’entreprise en considération de ses enjeux sociaux et environnementaux. Pour ce faire, il est proposé de modifier l’article L. 225-35 du Code de commerce ;
il est suggéré de renforcer le nombre des administrateurs salariés dans les conseils d’administration et de surveillance de plus de 1 000 salariés ; et il est envisagé d’étendre cette obligation aux sociétés de 500 à 1 000 salariés. Dans le même ordre d’idées, il est proposé de doter les SAS de plus de 5 000 salariés d’un conseil d’administration et de surveillance régis par les dispositions applicables aux SA pour qu’ils disposent des mêmes proportions d’administrateurs salariés.
Trois recommandations concernant des cadres juridiques optionnels ont été suggérées :
insérer, au sein d’un nouvel alinéa 2 de l'article 1835 du Code civil, la possibilité de faire figurer une « raison d’être » dans les statuts d’une société, quelle que soit sa forme juridique. Cet alinéa pourrait être ainsi formulé : « L’objet social peut préciser la raison d’être de l’entreprise constituée » ;
reconnaître dans la loi l’entreprise à mission, accessible à toutes les formes juridiques, dès lors qu’elles remplissent 4 critères ;
assouplir la détention de parts sociales majoritaires par les fondations et envisager la création d’un fonds de transmission et de pérennisation des entreprises.
Sont enfin formulées six recommandations à destination des praticiens et des administrations :
accompagner le développement des labels RSE sectoriels et faire de la RSE un outil de renforcement du dialogue social dans les branches professionnelles ;
inciter les grandes entreprises à se doter, à l’initiative des dirigeants, d’un comité des parties prenantes et généraliser l’existence au sein du conseil d’administration d’un comité qui éclaire sur la stratégie RSE de l’entreprise. Ces bonnes pratiques pourraient figurer dans les codes de gouvernance ;
développer les critères RSE dans les rémunérations variables des dirigeants ;
engager une étude sur le comportement responsable de l’actionnaire ;
engager une étude concertée sur les conditions auxquelles les normes comptables doivent répondre pour servir l’intérêt général et la considération des enjeux sociaux et environnementaux ;
envisager la création d’un acteur européen de labellisation.
(Rapp. « L’entreprise, objet d’intérêt collectif », 9 mars 2018)
Rédaction Lextenso