Les notaires de Loire-Atlantique ont organisé, le 11 juin dernier, un colloque sur le thème « Handicap & Notariat ».
Pour nos lecteurs, Me Teitgen, notaire à La Chapelle-sur-Erdre, revient sur l’évènement organisé par la chambre dont il est président.
Pourquoi avoir mis en place un colloque sur le thème du handicap ?
Depuis ma prise de mandat, en mai 2021, je souhaitais mettre en place un colloque sur le thème du handicap car j’avais détecté, dans ma pratique quotidienne, le besoin des familles personnellement touchées.
En effet, les clients connaissent nos missions traditionnelles mais ils ne nous consultent pas sur les questions complexes et anxiogènes qui entourent le sujet du handicap.
Or il était pour moi très important de donner en la matière un signal fort afin de renforcer la relation de confiance auprès de ces familles, qui résulte de la qualité de notre écoute et de notre expertise juridique.
J’ai donc proposé ce projet et c'est une quarantaine de notaires de notre département qui a répondu à l’appel en se mobilisant un samedi !
Pouvez-vous partager avec nous l'expérience de votre chambre ?
Ce colloque, qui a été suivi de consultations gratuites, a rencontré un véritable succès. Dans ce domaine, la notion de réseau est très forte et le bouche-à-oreille a parfaitement fonctionné, ce qui a permis de faire passer largement notre message. Et les notaires mobilisés en ont été chaleureusement remerciés.
Nous avons préparé cet évènement de manière très professionnelle puisque les notaires volontaires ont préalablement suivi une formation de deux fois 3 heures, assurée pour la chambre par l’UNOFI et le CRIDON Ouest, afin que chacun puisse approfondir ses connaissances dans les domaines proposés sous forme de trois tables rondes : la protection, la gestion des ressources et la transmission.
Sur le fond, tout d’abord, nous avons établi le programme à partir des interrogations de nos clients et nous avons échangé avec les associations du département afin qu’elles fassent remonter les questions.
Sur la forme, ensuite, nous avons souhaité proposer un double format : 220 personnes étaient présentes et 120 inscrits ont pu nous suivre à distance.
Le témoignage d’un couple en début de journée illustrait parfaitement l'attente : alors qu’il était chez son notaire nantais pour acquérir un bien immobilier, ce couple en est venu à parler de la situation de handicap d’un de leurs enfants ; les époux ont apprécié l’accompagnement qui leur a été proposé. Ils sont à présent heureux de former, selon leurs propres termes, « une véritable équipe avec leur notaire ».
Et c’est là notre rôle : écouter nos clients pour détecter les difficultés qu’ils rencontrent, s’emparer notamment de ce sujet du handicap afin de définir les objectifs à atteindre et y répondre par les solutions que nous maîtrisons.
Le colloque était suivi d’un cocktail qui a été l’occasion d’échanger avec les familles, étonnées et heureuses que les notaires s’intéressent à ce sujet.
Il y a une vingtaine d’années, la chambre de Paris avait évoqué l’idée du « notaire – guichet unique pour les familles ». C’est une notion que je reprends à mon compte car nous sommes utiles à la protection juridique de la personne et de son patrimoine.
Quels messages souhaitez-vous faire passer en la matière ?
Il me semble nécessaire de faire connaître aux familles que nous sommes là pour elles.
Nous avons un rôle important à jouer au sein de la société et il faut occuper pleinement la place qui est la nôtre.
Je suis très fier des notaires de Loire-Atlantique car ils ont prouvé qu’ils ne se contentaient pas de rédiger des actes et ils ont incarné, notamment à l’occasion de cet évènement, « La raison d’être du notariat ».
Les retours ont été très positifs et la réflexion va se poursuivre par une mobilisation auprès des associations pour un accompagnement sur le long terme.
D'autant plus que l'une des forces du notariat, c’est son maillage territorial : notre département compte 95 communes pourvues d'un notaire et il existe donc toujours un praticien à proximité.
En matière de protection des personnes, les familles gèrent souvent de façon non officielle « les affaires » de la personne touchée par le handicap. Or une organisation officielle permet justement de renforcer ses droits, d'autant plus qu'aux côtés de la tutelle et de la curatelle existent des moyens d'anticipation grâce aux mandats de protection future et pour autrui.
S’agissant de la gestion des ressources, il existe des produits spécifiques, comme l’assurance-vie épargne handicap, mais une réflexion de fond doit être menée. En effet, on constate souvent qu’il vaut mieux diminuer les charges plutôt qu’augmenter les ressources pour maintenir le niveau des aides sociales perçues : lorsque cela est possible, la meilleure solution est généralement d'assurer le logement de la personne concernée.
Enfin, la transmission est aussi un sujet à traiter sur-mesure car il n’existe pas de modèle type pour assurer l’équilibre familial.
L’État ne peut pas tout prendre en charge ; la solidarité familiale et de la société civile doit prendre le relais. C’est pourquoi la réflexion doit être poursuivie.
Et plus largement, quel témoignage voulez-vous partager ?
Notre place dans la société est importante, tant pour nos clients que pour les notaires qui nous rejoignent.
En effet, nombreux sont les créateurs qui nous ont rejoints et dont l'activité, tout naturellement, se tourne principalement vers l'immobilier. Mais il ne faut pas oublier les activités périphériques et notamment celui de conseil.
D'ailleurs, la prestation de serment des nouveaux venus est selon moi l'occasion de renouveler nos vœux : la « Raison d'être du notariat » doit continuer à faire frissonner chacun.
Il y a confraternité quand il y a partage des valeurs communes.
Et c'est précisément en cette sortie de crise Covid que j'ai souhaité renforcer la convivialité en organisant, en 2021, les « apéros de quartier ». En effet, en 2020, il n'y avait plus de rencontres possibles avec les confrères alors qu’environ 50 notaires avaient été nommés.
Il fallait créer du lien et réunir à une échelle très fine, celle du quartier. Des associations de jeunes notaires existent mais quand on ne connaît personne on n’y va pas. Le côté intimiste et le fait de rencontrer des notaires avec lesquels on partage régulièrement des dossiers étaient les points d’entrée.
Là aussi, le succès a été tel que des « apéros de quartier de rentrée » vont être relancés.
L'essentiel, c’est la relation !
Nous sommes des acteurs de terrain et si nous devons apporter des adaptations au métier, il ne faut pas perdre de vue l’essentiel.
C'est ainsi que pour les notaires de Loire-Atlantique, un guide de bonne pratique de la visioconférence a été établi, qui prévoit par exemple qu'elle ne peut pas être imposée.
La période a été dure pour tous : avec la crise sanitaire les collaborateurs ont été éprouvés, les clients ont également été secoués.
Il ne faut donc pas ajouter de difficultés mais au contraire assurer le confort des clients et cultiver le plaisir de partager entre confrères et collaborateurs.
(Propos recueillis par Liliane Ricco)