Effets de la révocation tacite d’une donation entre époux postérieurement au divorce

Le 24 octobre 1984, les époux Y.-A. se consentent mutuellement une donation au dernier vivant. Le 1er juillet 1994, leur divorce, sur requête conjointe, est prononcé de façon définitive. Aucune stipulation de la convention définitive, réglant les conséquences de celui-ci, ne fait état de cette institution contractuelle.

Le 18 mars 1997, Roger Y. consent une donation semblable à Mme Z., sa seconde épouse. Il décède le 5 juillet suivant, laissant pour lui succéder trois enfants de son union avec Mme A. Celle-ci, agissant en son nom et ès qualités, poursuit l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Gérard Y., en se prévalant de la donation qu'il lui avait consentie en 1984.

Aux termes d’un arrêt du 9 septembre 2003, les juges du fond décident que la donation au dernier survivant consentie le 18 mars 1997 par Gérard Y. à sa seconde épouse, Mme Z., avait révoqué tacitement celle, maintenue, précédemment consentie à Mme A.

Les consorts X. contestent l’arrêt de la cour d’appel faisant valoir, notamment :

- qu'aux termes de l'article 268 du Code civil, les époux qui divorcent sur demande conjointe, sont censés avoir maintenu les donations et avantages qu'ils s'étaient consentis, s'ils n'ont rien décidé de contraire ; qu'en déclarant que la donation avait été ultérieurement révoquée malgré le silence de la convention qui impliquait le maintien de la donation au profit d'une personne devenue tiers, ce qui rendait cette convention irrévocable, les juges du fond ont violé le texte susvisé et l'article 894 du Code civil ;

- que, faute d'avoir recherché si M. Y. n'avait pas renoncé à son droit de révocation du fait de l'absence de mentions de la donation dans la convention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 268 du Code civil ;

- qu'en refusant d'annuler la seconde donation qui portait sur des biens déjà aliénés et donc indisponibles, la cour d'appel a méconnu les droits des héritiers réservataires en violation des articles 1094 à 1098 du Code civil ;

- qu'en se contentant de viser la seconde donation pour caractériser la révocation de la première donation, bien que le bien litigieux n'y soit pas mentionné et que le donateur n'aurait pas agi autrement qu'il l'a fait, s'il avait entendu maintenir la première donation, et sans relever d'éléments caractérisant une intention révocatoire sur le bien litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 268 du Code civil ;

- que la cour d'appel qui affirme que l'attribution d'un immeuble était sans effet sur l'équilibre contractuel de la convention de divorce, pour n'être pas mentionnée, bien que cette convention avait pour effet de liquider tous les rapports patrimoniaux entre époux, de sorte que son équilibre est nécessairement affecté par tout élément de nature patrimoniale concernant les époux, a violé l'article 264-1 du Code civil.

Réfutant cette argumentation, la Cour de cassation approuve l’arrêt de la cour d’appel : fait une exacte application des articles 268 et 264-1 du Code civil, la cour d’appel qui, après avoir relevé que la convention ayant réglementé les effets du divorce sur demande conjointe des époux Y.-A. ne contenait aucune stipulation relativement aux donations et avantages que les époux s'étaient consentis au cours du mariage, retient, d'une part, que la donation au dernier survivant du 26 octobre 1984 portant sur des biens à venir demeurait révocable, d'autre part, que la donation ultérieurement consentie par Gérard Y. à sa seconde épouse, portant sur les mêmes biens, constituait un acte non équivoque de révocation de la première, enfin, que le caractère « définitif » de la donation consentie à Mme A. n'avait pas été stipulé aux termes de la convention des parties, sans avoir à répondre à un moyen inopérant tiré d'une prétendue violation des droits des héritiers réservataires, alors qu'elle avait relevé l'absence de toute clause d'irrévocabilité dans la convention définitive passée par les époux Y.-A.

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